Sommaire
La trichinellose, ou trichinose, est une zoonose cosmopolite, due à un nématode du genre Trichinella, où l’homme est un hôte accidentel. Sept espèces de Trichinella sont à l’origine de la maladie chez l’homme : T. spiralis (cosmopolite et inféodée au porc), T. pseudospiralis (cosmopolite), T. nativa (zones arctiques), T. nelsoni (Afrique tropicale), T. britovi (régions tempérées d’Europe, d’Afrique). T. murrelli (Amérique du Nord), T. papuae (rares cas en extrême orient après consommation de reptiles). Actuellement, en France, on observe de rares cas sporadiques, autochtones (liés à la consommation de viande de sanglier) ou au retour de voyages (liés à la consommation de porc, de phacochère ou encore d’ours…).
1 - DIAGNOSTIC
Le diagnostic est évoqué sur l’association d’un syndrome musculaire douloureux souvent invalidant, d’un œdème facial et d’une fièvre élevée (souvent supérieure à 39° C). Ces signes sont présents dans environ 80 p. 100 des cas. Des signes digestifs inaugurent la maladie dans 40 p. 100 des cas (phase digestive), précédant le tableau aigu (phase d’invasion musculaire par les larves) qui apparaît vers le dixième jour de l’infestation. Les myalgies et faiblesse musculaire touchent préférentiellement et successivement les muscles extra-oculaires (photophobie), les masséters (pseudo-trismus), les muscles du cou (douleur à la déglutition, à la phonation), les muscles linguaux, de flexion des extrémités et lombaires. La fièvre dure moins d’une semaine ; les signes musculaires ont un maximum d’intensité vers la 2e-3e semaine d’évolution, durent 1 à 2 mois et s’amendent en 3 à 6 mois.
L’œdème palpébral, facial et/ou conjonctival est caractéristique et précoce (7e au 25e jour) et dure quelques jours. C’est un œdème qui respecte l’architecture générale du visage et qui est bien différent de l’œdème de Quincke et des angiœdèmes non histaminoergiques. La conjonctivite, avec parfois des hémorragies sous-conjonctivales, régresse plus lentement. Une éruption urticarienne ou morbiliforme (//www.cmaj.ca/content/176/4/449/F1.expansion.html) du tronc, de l’abdomen et des membres s’observe parfois lors de la phase d’invasion. Le prurit est variable mais peut être signalé des mois après l’infestation initiale. Les hémorragies sous-unguéales en flammèche, distales, sont caractéristiques (bien que non spécifiques), mais rares. Des œdèmes périphériques ont été décrits. Des formes asymptomatiques ou pauci symptomatiques sont possibles, en particulier chez les enfants. Les complications neurologiques et/ou cardiaques font la gravité de la maladie qui est exceptionnellement létale. L’intensité des symptômes est liée à la quantité de larves ingérées mais également à l’espèce de trichine responsable : Trichinella spiralis étant la plus pathogène.
Le retentissement psychologique est variable, les signes subjectifs parfois persistants (prurit, dermographisme, asthénie et myalgies).
Des signes biologiques non spécifiques ont une grande valeur d’orientation diagnostique : l’hyperéosinophilie sanguine (précoce, supérieure à 1 000/mm3 associée à une augmentation des enzymes musculaires (CPK et LDH).
Les principaux diagnostics différentiels sont parasitologiques (bilharziose en phase d’invasion) mais aussi médicaux : dermatomyosite, syndrome de Churg et Strauss, périartérite noueuse, toxicité musculaire de certains médicaments (statines par exemple) ou compléments alimentaires, syndrome de Shulman…
Le diagnostic est évoqué sur des données épidémiologiques (ingestion de viande crue ou mal cuite contenant des larves de Trichinella encapsulées). La viande en cause est le plus souvent de porc, de sanglier, ou d’ours, parfois de morse ou de canidés, de phacochère, animaux omnivores se contaminant à partir de rongeurs ou de congénères infestés. La viande de cheval a été source d’importantes épidémies par le passé.
Le diagnostic est confirmé par la sérologie. Le dépistage se fait en ELISA ou en immunofluorescence indirecte, la confirmation par Western blot. Les anticorps apparaissent 10 à 15 jours après l’infection (quelques jours après les signes cliniques de la phase aigue) et l’observation d’une séroconversion a une grande valeur diagnostique. Une sérologie positive ne permet pas d’affirmer le caractère récent de l’infestation et, en cas de doute devant un tableau clinique évocateur, elle doit être refaite 8 à 15 jours après le premier prélèvement. La sérologie peut rester positive de longues années. La biopsie musculaire (larves objectivées dès la troisième semaine) permet le diagnostic parasitologique direct mais elle n’a de justification qu’en cas de doute diagnostique.
2 - TRAITEMENT
Le traitement est symptomatique (antalgiques, antipyrétiques et corticothérapie) et anthelminthique. La corticothérapie générale (prednisone, 1 mg/kg/jour pendant une semaine)) est actuellement recommandée systématiquement ; les formes graves peuvent nécessiter des mesures de réanimation.
Le traitement anthelminthique est prescrit et sera d’autant plus efficace qu’il sera prescrit tôt. Son intérêt est de détruire les vers adultes à la phase digestive et de diminuer la dissémination musculaire, mais son effet sur les larves à la phase d’état n’est pas démontré.
On utilise l’albendazole (Zentel®, Eskazole® réservé à l’usage hospitalier) à la posologie de 15 mg/kg/j, soit un comprimé à 400 mg deux fois par jour, pendant dix à quinze jours ; il existe une forme suspension buvable à 4 p. 100 à utiliser chez l’enfant. Il est contre-indiqué en cas de grossesse et chez l’enfant de moins de 2 ans. Ce médicament est actuellement disponible en officine et remboursé à 65 p. 100 par l’Assurance maladie.
3 - PRÉVENTION
Dans les pays où les règles sanitaires et d’hygiène alimentaire sont appliquées, la trichinellose est rare. Dans les zones géographiques ou les contextes (chasse) où ces règles ne s’appliquent pas, la prophylaxie individuelle est primordiale : cuisson suffisante de la viande de porc ou d’animaux sauvages. Les larves sont détruites par la cuisson à une température supérieure à 65 °C pendant 5 minutes (viande brune à cœur). L’emploi des fours à micro-ondes n’est pas recommandé. Les larves de Trichinella spiralis sont détruites en une dizaine de jours par une congélation à -20°C mais les larves de T. britovi et surtout de T. nativa sont résistantes à la congélation. Une salaison artisanale non contrôlée et surtout le fumage sont sans effet.
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