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Mycétomes

1er avril 2012, par DEVELOUX M.

Les mycétomes se définissent comme des processus pathologiques au cours duquel des agents étiologiques fongiques ou actinomycosiques d’origine exogène produisent des grains parasitaires. Cette définition exclut l’actinomycose vraie à Actinomyces israeii d’origine endogène.

Les mycétomes sont des infections des zones tropicales semi-arides. Les principaux foyers d’endémie sont le Mexique, l’Afrique de part et d’autre du 15e parallèle Nord, le Moyen-Orient et l’Inde. Les cas rencontrés en Europe sont pour la plupart observés chez des immigrés originaires des pays d’endémie, mais de rares cas autochtones ont été décrits. Globalement, les actinomycétomes prédominent par rapport aux mycétomes fongiques.

Les agents infectieux vivent en saprophytes sur le sol et les végétaux (épineux). Ils sont inoculés à la suite de microtraumatismes, ce qui explique le caractère rural de la maladie. Il existe une prédominance masculine, la tranche d’âge 20 à 40 ans étant la plus touchée.

Les formes typiques posent peu de problème diagnostique La localisation, unilatérale, concerne le pied dans plus de 70 p. 100 des cas. L’aspect clinique est celui d’une tumeur fistulisée (« pied de Madura »). Les fistules émettent du pus contenant des grains souvent visibles à l’œil nu. Certains diagnostics différentiels peuvent parfois se discuter : une maladie de Kaposi, une tuberculose, une ostéomyélite ou une autre mycose profonde.

Le diagnostic de certitude repose sur l’examen direct des grains et/ou du pus, la culture et l’histologie. La couleur des grains est d’une grande importance : les grains noirs sont toujours fongiques (Madurella mycetomatis, Leptosphaeria senegalensis), les grains rouges sont toujours actinomycosiques (Actinomadura pelletieri), les grains blancs ou jaunes sont fongiques (Pseudallecheria boydi) ou actinomycosiques (Nocardia sp, Actinomadura madurae).

L’évolution est chronique ; s’étendant sur plusieurs années, elle se fera vers des complications dont la principale est l’atteinte osseuse. La maladie devient alors très invalidante.

1 - STRATÉGIE DE SURVEILLANCE

Avant d’entreprendre un traitement, il faut toujours faire un bilan d’extension qui comportera un bilan radiologique. Les nouvelles techniques d’imagerie médicale (tomodensitométrie, IRM) permettent de bien préciser les limites de la tumeur. Ces mêmes techniques permettent, en cours de traitement, de juger du résultat de celui-ci.

2 - OUTILS DU TRAITEMENT

Les mycétomes posent toujours un problème thérapeutique difficile, surtout les mycétomes fongiques pour lesquels il n’existe pas de traitement médical satisfaisant. Le choix thérapeutique sera radicalement différent selon que l’on traite un mycétome fongique ou un actinomycétome

Les mycétomes fongiques relèvent d’un traitement antifongique initial mais il est rare qu’il soit suffisant pour entrainer une guérison et il devra être suivi d’un geste chirurgical. De nombreux antifongiques ont été essayés dans le traitement des mycétomes fongiques avec des résultats variables. Certains azolés ont montré une activité in vitro mais il n’y a pas toujours corrélation avec l’activité in vivo. Les seuls résultats convaincants (guérison ou amélioration) ont été obtenus avec l’itraconazole. Le voriconazole et le posaconazole ont également une activité comme en témoignent par quelques succès ponctuels qui demandent à être confirmés. La réponse semble meilleure lorsque le mycétome fongique est à grains blancs.

Le traitement de première intention des actinomycétomes est toujours médical. Le traitement actuellement retenu est le cotrimoxazole. En cas de non-réponse ou de réponse médiocre au traitement classique les auteurs mexicains proposent d’y associer l’amikacine par cycles. L’amoxicilline-clavulanate est une autre option mais les succès thérapeutiques ont été obtenus pour des mycétomes à Nocardia sp et on ne possède pas de données concernant son action sur d’autres espèces responsables d’actinomycétomes. D’autres molécules sont en cours d’évaluation.

3 - STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE

Pour les mycétomes fongiques, il est recommandé de débuter par un traitement médical. En pays endémique sa limitation est le coût élevé des azolés qui doivent être utilisés pendant de longues périodes. La durée du traitement va de 6 mois à 2 ans voir plus. Les auteurs soudanais ont présenté une série de 13 cas traités par itraconazole pendant 3 mois à la dose de 400 mg/j diminuée à 200 mg/j pendant les neuf mois suivant. Une seule guérison a été obtenue par traitement médical mais dans les autres cas celui-ci permettait une encapsulation des lésions rendant la chirurgie plus aisée, moins mutilante et diminuant le risque de récidive. Quelques guérisons ont été obtenues avec le voriconazole et le posaconazole mais des échecs thérapeutiques ont également été signalés. En l’absence d’étude sériée il est difficile de tirer de conclusion. La plupart des auteurs s’accordent pour la nécessité d’un traitement médical suivi d’une sanction chirurgicale. Son but est de garder le potentiel fonctionnel du patient tout en pratiquant une exérèse large pour éviter une reprise secondaire du processus. Trop souvent en zone endémique l’amputation reste la seule possibilité en raison du retard diagnostique et des difficultés à obtenir les antifongiques. Il peut s’agir d’amputations limitées en cas d’atteinte des orteils, des métatarsiens et des doigts. Dans les formes plus importantes, on est amené à pratiquer des amputations majeures et proximales. Lorsque cela est possible, on choisira les amputations permettant de garder un moignon autorisant l’appui.

Le traitement de première intention des actinomycétomes, sauf exception (cas historiques), est toujours médical. Le traitement chirurgical d’emblée, surtout lorsque les grains sont de petite taille, favoriserait les métastases ganglionnaires et les diffusions à distance. Le traitement actuellement retenu est le cotrimoxazole pour une durée minimale d’un an. Il peut être prolongé s’il n’y a pas de guérison au bout de cette période. En cas d’absence de réponse ou de réponse insuffisante, les auteurs mexicains proposent d’associer au traitement classique l’amikacine par cycles. Un cycle comporte l’amikacine (15 mg/kg/j) pendant trois semaines et le cotrimoxazole (7 à 35 mg/kg/j) pendant cinq semaines. Plusieurs cycles, jusqu’à 4, peuvent être nécessaires.

Il est très difficile d’affirmer la guérison d’un mycétome à l’arrêt d’un traitement qui, cliniquement, a semblé efficace. La maladie étant d’évolution torpide, des reprises du processus infectieux ont été observées longtemps après cette guérison apparente. Il faudra donc suivre régulièrement le patient sur le plan clinique pendant plusieurs années. Les reprises du processus après guérison apparentes sont plus fréquentes avec les mycétomes fongiques.

La prophylaxie des mycétomes comporte le traitement immédiat des plaies et traumatismes susceptibles d’être infectants et surtout le port permanent de chaussures en zone d’endémie. Mais cette une mesure est impossible à faire respecter. Un dépistage précoce est primordial pour espérer les meilleurs résultats thérapeutiques.

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