Miliaires sudorales

24 février 2005, par TRAORE A.

1 - DIAGNOSTIC

Les miliaires sont des rétentions sudorales dues à une obstruction des canaux sudoraux. Selon le niveau d’obstruction, on distingue la miliaire cristalline, la miliaire rouge et la miliaire profonde.

1.1 - MILIAIRE CRISTALLINE

Elle survient lors des affections fébriles aiguës avec hypersudation brutale mais peut se voir également lors des classiques coups de soleil. Il s’agit d’une éruption asymptomatique faite de multiples lésions vésiculeuses superficielles à contenu clair, comme des gouttes de rosée reposant sur une peau saine, siégeant sur le tronc et l’abdomen, mais également sur le visage chez l’enfant. L’obstruction se fait au niveau de la couche cornée. La miliaire cristalline guérit spontanément en quelques heures en laissant une desquamation furfuracée.

1.2 - MILIAIRE ROUGE

C’est la classique bourbouille, qui survient au cours des expositions prolongées aux atmosphères chaudes, humides ou sèches, en présence de facteurs favorisants (tableau I). L’éruption est faite d’éléments non folliculaires, papuleux et papulo-vésiculeux de taille uniforme, de 1 à 2 mm de diamètre, rouge vif et reposant sur une base inflammatoire. On note un prurit et une sensation de cuisson d’intensité variable. Les lésions sont ubiquitaires mais atteignent préférentiellement les faces latérales du tronc, le dos, le cou et les zones de friction (grands plis...). Chez l’enfant et les femmes utilisant des cosmétiques occlusifs, on note souvent une atteinte du visage et des formes très profuses. Parfois, les lésions deviennent pustuleuses, définissant ainsi la miliaire pustuleuse dont les lésions sont amicrobiennes. Si les mauvaises conditions persistent, l’éruption peut devenir lichénoïde, avec des éléments papuleux bombés. Les complications peuvent s’installer à tout moment (tableau II). Dans les formes frustres, tout se résume à des îlots érythémateux desquamatifs et prurigineux, évocateurs par leur siège et leur exacerbation à la chaleur. L’obstruction se fait au niveau du corps muqueux de Malpighi. Si les conditions s’améliorent, la maladie guérit en laissant une desquamation furfuracée caractéristique. Cette guérison est suivie d’une hypohidrose des zones atteintes pendant deux à trois semaines, exposant aux rechutes.

1.3 - MILIAIRE PROFONDE

Elle est rare, survient après plusieurs accès de miliaire rouge et se voit essentiellement en milieu tropical. L’éruption est asymptomatique, faite d’éléments papuleux de 1 à 3 mm de diamètre, siégeant sur le tronc, mais également sur les extrémités contrairement aux autres miliaires. La peau est globalement sèche. L’obstruction se situe au-dessous de la jonction dermo-épidermique. La forme profonde est associée à des adénopathies axillaires et inguinales et à une hyperhidrose compensatrice du visage et des régions axillaires. Chez ces patients peut se développer l’asthénie anhidrotique tropicale, qui est la phase ultime de ce trouble majeur de la sécrétion sudorale. Elle se caractérise par des signes généraux et fonctionnels à type d’asthénie, de malaise, de vomissements, de lipothymies et de tachycardie. Les signes généraux sont souvent au premier plan et font errer le diagnostic. Ce tableau peut conduire à une hyperthermie maligne pouvant entraîner la mort si l’exposition persiste.

2 - PHYSIOPATHOLOGIE

L’étiopathogénie exacte des miliaires sudorales est mal connue. L’obstruction du canal sudoral est due à du matériel PAS positif associé ou non à un bouchon parakératosique. L’origine exacte de ses deux éléments est mal connue. Le primum movens serait, selon les études, une hyperhydration de la couche cornée par la sueur riche en sodium, une délipidation des kératinocytes du pourtour des pores sudoraux ou une lésion des cellules luminales par des cocci, notamment Staphylococcus epidermidis. Il existe également une prédisposition génétique. L’affection est probablement multifactorielle

3 - TRAITEMENT

3.1 - BUTS

Les buts du traitement sont de diminuer ou d’arrêter la sécrétion sudorale, de permettre et d’accélérer l’évaporation de la sueur déjà sécrétée, de prévenir et de traiter les complications et les récidives, enfin de favoriser la desquamation.

3.2 - MOYENS

Les mesures consistant à modifier la température et l’humidité de l’environnement du patient sont les seules mesures vraiment radicales. Beaucoup de moyens sont utilisés de manière empirique. Les mesures générales reposent avant tout sur l’utilisation d’air conditionné ou de brasseurs d’air quelques heures par jour ou en continu. L’acide ascorbique (1 g/j), la lanoline anhydre, les antiseptiques, les antibiotiques par voie locale et/ou générale, les poudres inertes ou antiseptiques, les kératolytiques et les rétinoïdes par voie locale sont utilisés dans cette indication. La littérature sur ces troubles très fréquents en milieu tropical est très pauvre. Aucun essai contrôlé n’est évidemment disponible. Les antihistaminiques par voie générale ou des lotions calmantes peuvent atténuer les signes fonctionnels. Dans les cas graves conduisant à l’intolérance à la chaleur, seul le changement de milieu peut amener une guérison.

3.3 - INDICATIONS

La miliaire cristalline guérit spontanément ; il faut donc s’abstenir de tout traitement local inutile.

Dans la miliaire rouge, aucun traitement spécifique n’est nécessaire dans les formes peu étendues et non compliquées. On propose de supprimer les facteurs favorisants, notamment les cosmétiques occlusifs, et l’on donne des antiseptiques. Dans les formes étendues non compliquées, l’air conditionné et/ou le brasseur d’air sont utiles. On y adjoint des antiseptiques et éventuellement des poudres inertes. C’est dans cette indication que l’acide ascorbique (1 g/j) est parfois recommandé. Si les signes fonctionnels sont importants, on peut prescrire des antihistaminiques par voie générale et des bains émollients. En cas de surinfection, un antibiotique actif sur les principaux germes cutanés sera ajouté (macrolides ou pénicilline M principalement). L’eczématisation impose l’arrêt des topiques et la prescription d’une courte corticothérapie locale.

Dans la miliaire profonde, les mêmes mesures sont utiles. En l’absence d’amélioration au bout de 2 à 3 semaines, il faut envisager le changement de milieu. La lanoline appliquée sur les lésions, associée à l’isotrétinoïne per os, a été recommandée, sans que l’on puisse affirmer la validité de ce schéma.

Tableau I Facteurs favorisants des miliaires.

Stress

Exercices physiques intempestifs non progressifs

Port d’habits trop serrés et imperméables (tissus synthétiques)

Usage de cosmétiques occlusifs non hydrophiles

Bains trop fréquents, surtout en eau salée

Usage fréquent de savons trop détergents

Inflammation cutanée préalable

Antécédents de crises de miliaire sudorale dans la famille

 

 

Tableau II Complications des miliaires sudorales.

Infections à type d’impétigo, de folliculite superficielle, de furoncle ou de périporites évoluant vers des abcès

Eczématisation

Retentissement psychosocial du fait de l’impact esthétique de l’atteinte du visage et de l’insomnie due au prurit

Chéloïdes

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