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L’épidermodysplasie verruciforme, ou syndrome de Lutz-Lewandowski, est une génodermatose rare se révélant, à l’âge de 5 à 7 ans, par l’apparition de lésions cutanées polymorphes : verrues planes, taches dépigmentées donnant un aspect voisin du pityriasis versicolor (pityriasis versicolor-like), placards pigmentés ou psoriasiformes polycycliques, qui persistent toute la vie. Après 30 ans, dans la moitié des cas d’épidermodysplasie verruciforme apparaissent des lésions pré-épithéliomateuses et des carcinomes cutanés baso- et spinocellulaires [1, 2].
L’épidermodysplasie verruciforme est caractérisée par une sensibilité anormale à l’infection par une vingtaine de virus tous apparentés, les papillomavirus humains (PVH) du groupe B ou PVH de l’épidermodysplasie verruciforme : PVH-5, 8, 9, 12, 14, 15, 17, 19-25, 36-38, 47-50... Alors que tous ces virus sont détectés dans les lésions bénignes, seuls certains types, essentiellement PVH-5, sont incriminés dans la carcinogenèse cutanée. L’infection par le PVH-5 constituerait un facteur de risque de développer des cancers, d’où la nécessité de faire un typage et de rechercher des séquences spécifiques de ce virus [2]. Des techniques très sensibles de biologie moléculaire (réaction de polymérisation en chaîne nichée [ou nested PCR]) ont en fait démontré que les PVH de l’épidermodysplasie verruciforme sont ubiquitaires dans la population générale sans qu’un rôle pathogène ne leur soit attribué. Ils pourraient cependant intervenir dans la carcinogenèse cutanée chez les transplantés rénaux.
L’épidermodysplasie verruciforme est une maladie multifactorielle faisant intervenir, outre des virus spécifiques, des facteurs génétiques, immunologiques et environnementaux. Le mode de transmission de l’épidermodysplasie verruciforme est le plus souvent autosomique récessif. Deux gènes associés à l’épidermodysplasie verruciforme ont été initialement identifiés (EVER1 ou TMC6 et EVER2 ou TMC8, localisés sur le chromosome 17 (locus EV1)) [3]. Ces gènes encodent pour une protéine trans-membranaire associée à un transporteur de zinc (Znt1), et de ce fait régulent la distribution intra-cellulaire de zinc et contrôlent les facteurs de transcription zinc-dépendants et la prolifération cellulaire [3]. Un second locus de prédisposition à l’épidermodysplasie verruciforme a aussi été identifié sur les chromosomes 2 (EV2). D’autres gènes ont été plus récemment identifiés, tels que RHOH, MST1, COROA1, impliqués dans d’autres déficits immunitaires, et mettant en jeu des déficits de l’immunité cellulaire T [4-8]. Des facteurs immunologiques sont aussi identifiés, déficit de l’immunité cellulaire non spécifique, mais aussi inhibition spécifique des cellules NK ou de la réponse proliférative des lymphocytes T à l’égard de kératinocytes autologues infectés par un PVH de l’épidermodysplasie verruciforme [9]. Enfin la photodistribution des cancers cutanés dans l’épidermodysplasie verruciforme indique que les ultraviolets interviennent par leur effet mutagène et/ou immunomodulateur.
L’hypothèse d’un déficit immunitaire spécifique dans l’épidermodysplasie verruciforme est corroborée par l’apparition de tableaux cliniques et virologiques voisins de l’épidermodysplasie verruciforme (phénocopies) au sein de populations immunodéprimées : syndrome de Wiskott-Aldrich, transplantation rénale, hémopathies, infection par le VIH [10].
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